Soigner l’expérience Candidat n’aura jamais été aussi important

Publié le 13 mars 2023
Temps de lecture estimé : 8 min

Avec les tensions actuelles sur le marché de l’emploi, le candidat est plus que jamais en situation de force. Raison de plus pour lui proposer un parcours de recrutement fluide et engageant.

Inflation, réchauffement climatique, guerre en Ukraine, mouvements sociaux… En dépit de la multiplication des crises, l’économie française fait preuve d’une belle résilience, avec un nombre de demandeurs d’emploi en baisse constante. Au dernier trimestre 2022, le taux chômage a encore reflué de 0,1 point pour s’établir à 7,2 % de la population active, soit le niveau le plus bas depuis la crise financière de 2008. Les difficultés de recrutement que connaissent les employeurs pour certains métiers en tension, notamment dans l’agroalimentaire, risquent de s’accentuer encore dans les prochains moins. Cette pénurie de compétences inverse le rapport de forces sur le marché de l’emploi. Ayant l’embarras du choix, le candidat peut se montrer exigeant.

Dans ce contexte, l’expérience candidat revêt une importance d’autant plus forte. D’après les Français interrogés par l’Ifop (lire encadré), elle sert de révélateur. Ils sont 80 % à penser que l’expérience de candidature est un bon indicateur de la manière dont une entreprise traite ses salariés.

Dans un livre blanc dédié au sujet, l’éditeur CleverConnect note aussi que les candidats se comportent de plus en plus comme des consommateurs dans l’e-commerce. « Ils souhaitent que tout soit accessible très facilement, et que le process de recrutement soit clair et rapide. » Le moindre grain de sable sur un parcours de recrutement peut mettre fin à la candidature.

Attention à l’effet boîte noire !

Il faut commencer par donner envie de postuler. L’offre emploi doit être bien sûr attractive, mais aussi claire et transparente sur le périmètre du poste à pourvoir et ses missions. Par ailleurs, poster une annonce ne suffit plus, une entreprise doit aussi mener une stratégie active de marque employeur, en particulier sur les réseaux sociaux.

Avant d’aller plus loin, un candidat a, en effet, le réflexe de se renseigner en ligne sur le profil de l’entreprise et vérifier que les valeurs qu’elle affiche sont non seulement réelles, mais en concordance avec les siennes. Les actifs des générations Y et Z sont particulièrement sensibles aux engagements sociétaux et environnementaux.

Ensuite, le parcours de candidature doit être le plus simple et fluide possible. Fortement digitalisé, il démarre sur un site de recrutement ou sur l’espace emploi de votre site institutionnel. Pas de formulaire à champs multiples à remplir, mieux vaut laisser la possibilité de déposer son CV en ligne. Il sera toujours possible de recueillir les informations manquantes lors des prochaines étapes. Exiger une lettre de motivation peut également braquer les postulants les plus jeunes, peu rodés à cette pratique. Attention à l’effet boîte noire ! L’employeur doit non seulement accuser réception de la candidature, mais aussi préciser quelles seront les prochaines étapes et selon quel calendrier.

Une fois la première sélection établie, un appel téléphonique permet à la fois de féliciter les candidats retenus et de valider certains points clés comme sa disponibilité réelle et… sa motivation.

Il convient aussi de répondre aux autres candidats. Le refus doit être motivé et assorti de conseils pour, par exemple, améliorer un CV. Pour ne pas injurier l’avenir, il est aussi possible de laisser une porte ouverte en suggérant aux postulants éconduits de s’abonner à la newsletter ou aux profils sociaux de l’entreprise.

Digitaliser le processus de recrutement mais pas trop

Depuis la crise sanitaire, les processus sont de plus en plus dématérialisés, à commencer par l’entretien d’embauche qui se tient souvent en visioconférence. Ce recrutement virtuel a l’avantage de la praticité. Un candidat en poste peut mener un entretien à distance sans avoir à prendre une demi-journée de congé.

Un entretien physique permet quant à lui à un candidat de se projeter sur son potentiel lieu de travail et de rencontrer ses futurs managers et collègues. Un parcours comprenant généralement plusieurs entretiens, un mode hybride mêlant distanciel et présentiel est à préconiser.

Entre le dépôt de candidature et la réponse finale, le parcours doit être le plus ramassé possible. Il s’agit non seulement de couper l’herbe à une éventuelle proposition d’une société, mais aussi de garder intacte la motivation du candidat en évitant l’effet tunnel. La période entre la signature du contrat de travail et l’entrée en fonction effective est aussi sensible. Comme un cheval refusant l’obstacle, un candidat peut revenir sur sa décision. Dans sa phase dite de pré-onboarding, il s’agit de maintenir le contact avec lui en envoyant le fil d’actualités de l’entreprise ou une invitation à un événement interne.

— Xavier BISEUL (Tribune Verte 3009)

Étude : HUIT CANDIDATS SUR DIX CONFRONTÉS À UNE MAUVAISE EXPÉRIENCE !

Une étude menée par l’Ifop pour les éditeurs Yaggo et Caask rappelle que le marché tourne progressivement à l’avantage des demandeurs d’emploi. L’expérience candidat devient dès lors prédominante pour « jauger » la pertinence d’un employeur. 80 % des postulants pensent que l’expérience de candidature est un bon indicateur de la manière dont une entreprise traite ses salariés. Pour autant, les entreprises semblent partir de loin. Huit candidats sur dix ont déjà été confrontés à au moins une mauvaise expérience lors d’un processus de recrutement. Ils citent en premier l’absence totale de réponse (64 %), puis la réception d’une réponse automatique et impersonnelle (48 %) et le manque de retour à la suite d’un entretien (44 %). Parmi les freins à la candidature, les salariés français citent la présentation du CV au format vidéo (54 %), la fourniture de réponses toujours en vidéo (42 %), la participation à un jeu (27 %), la rédaction d’une lettre de motivation (20 %) ou le passage d’un test en ligne (13 %).

Avis d’expert : « TROP DE CANDIDATS  ABANDONNENT EN COURS DE PROCESS »

Emmanuel Stanislas, fondateur de Clémentine, cabinet de recrutement du digital et de l’IT (propos extraits d’une tribune libre).

Quelle expérience vivent les candidats ?


Emmanuel Stanislas : Les moyens de contact entre l’entreprise et les candidats se sont multipliés ces vingt dernières années : sites spécialisés, espaces de recrutement corporate, réseaux sociaux dont les outils permettent de solliciter massivement sans être introduit, etc. Les organisations ont cherché à multiplier ces moyens dans une logique quantitative, pensant qu’en «bombardant» largement leurs offres, les chances de trouver la perle rare seraient statistiquement meilleures. Or, de l’avis des candidats, cela génère le plus souvent une expérience incohérente, voire dissuasive.

Quelles conséquences à cette logique quantitative ?


E. S. : Si l’optimisation du parcours-client vise à maximiser le nombre de clients via l’amélioration du taux de conversion, il en va tout autrement du recrutement. Le nombre de candidats potentiels n’est pas illimité, de même que le nombre de postes à pourvoir ! Plus encore, l’expérience peut être déceptive pour les talents non retenus. Elle crée forcément plus de mécontents que de satisfaits. Actuellement, trop de candidats abandonnent en cours de process, qu’ils refusent un énième entretien ou tout simplement disparaissent ; d’autres rejettent simplement l’offre qui leur est faite en fin de sélection. Ce qui est en cause est souvent une expérience malheureuse auprès d’un manager et/ou un ressenti général négatif : un accueil manquant de chaleur, un retard trop important, une méconnaissance de leur parcours…

Comment dès lors repenser l’expérience candidat ?


E. S. : Les candidats attendent plus du parcours de sélection du recrutement. Le parcours candidat tel qu’il existe aujourd’hui a donc besoin d’être envisagé et formalisé en ce sens, comme une relation bilatérale entre une organisation et un collaborateur et/ou ambassadeur potentiel – une relation dont toutes les étapes comptent et où les affects sont devenus plus déterminants qu’ils ne l’étaient hier. S’inspirer de la conception du parcours-client est certes positif, mais il faut sans doute aller plus loin en ce sens, c’est-à-dire optimiser le parcours candidat en tenant compte d’une de ses spécificités : la dimension subjective. On parle bien ici d’expérience, de vécu et de ressenti. Rappelons enfin que ce recrutement ne s’arrête pas une fois le contrat signé. La préparation en amont de l’arrivée des nouvelles recrues, ainsi que la qualité de l’intégration qui leur sera proposée sont de nature, elles aussi, à affecter leur expérience.

 

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