Aides à l’agriculture biologique : La fin d’une unité nationale
Sur l’ensemble des aides auxquelles les agriculteurs bio peuvent prétendre, la tendance est nette, avec la nouvelle mouture de la PAC, de renforcer l’écoconditionnalité qui peut leur profiter. Mais les dossiers restent toujours aussi complexes, en particulier avec le pilotage de certaines aides transférées aux régions.
Arrivées dans la PAC par le deuxième pilier, les aides agroenvironnementales intègrent désormais surtout le premier pilier. Pour cela, la FNAB édite des fiches pratiques sur la nouvelle réforme, avec des points de vigilance particuliers pour les agriculteurs bio. Attention cependant : l’agence de services et de paiement (ASP) paye les aides, mais les contrôles aussi. Elle s’est pour cela dotée d’une intelligence artificielle et de vues satellites, pour réduire les contrôles terrain. Autre nouveauté : certaines aides sont maintenant pilotées par les régions. C’est le cas notamment de la DJA, et de certaines Maec. Mais les régions peuvent désormais choisir les modalités et les montants qu’elles attribuent aux aides qui leur ont été transférées. Certaines régions proposent par exemple des aides à l’investissement dépendantes (ou pas) de la PAC. Il convient de se renseigner auprès des services de son domicile. Les mesures présentées ici sont non exhaustives, l’accent n’est mis que sur les principales aides accessibles aux producteurs bio et/ou en conversion bio.
Informations transversales sur la nouvelle PAC 2023-2027
L’État conserve la gestion de l’ensemble des aides agricoles du 1er pilier de la PAC (DPB, aides couplées et découplées, écorégime) et des aides liées à la surface (Maec systèmes et localisées, ICHN) ou assimilées (prédation, assurance récolte). Les aides dites « découplées » ne peuvent être activées qu’avec détention de droits à paiement de base (DPB entier ou partiel). Les aides couplées, à l’inverse, peuvent être activées sans détention de DPB (entier ou partiel).
Le premier pilier, le plus important, complète le revenu des agriculteurs. Les aides du deuxième pilier poursuivent un objectif de développement rural. Les seules mesures spécifiques pour les bio sont les aides à la conversion.
1er pilier : aides découplées (indépendantes de la production)
Les DPB sont maintenus à l’identique. Le montant est de 127 euros par DPB. Ils sont le préalable à l’accès pour les autres aides découplées. L’écorégime est une nouveauté de la PAC 20232027, qui vise à rémunérer les services environnementaux mis en place par les agriculteurs. Il remplace le « paiement vert » de la précédente PAC. L’écorégime est un paiement direct, découplé, uniforme, de 110 €/ha, versé annuellement sur tous les hectares admissibles. Il est accessible de trois façons : par la voie des pratiques, par la voie de la certification, ou par la voie des éléments favorables à la biodiversité. Pas de cumul, mais un « bonus haie » de 7 €/ha est possible. Des modalités particulières s’appliquent pour les exploitations en conversion
Une nouvelle aide complémentaire au revenu pour les jeunes agriculteurs (ACJA) est possible pour tous ceux qui relèvent du statut de JA. Compter 4 469 euros par exploitation en 2023.
Enfin, une aide redistributive complémentaire remplace l’ancien paiement redistributif. Elle s’applique sur les 52 premiers hectares admissibles des exploitations éligibles, dès lors qu’elles activent 1 DPB ou une fraction de DPB. En 2023, cette aide se monte à 48 €/ ha.
1er pilier : aides couplées (liées à une production)
Une aide pour les légumineuses à graines est maintenue pour renforcer l’autonomie protéique de l’Europe, tant en alimentation animale qu’humaine. Les lentilles, les haricots secs, les pois chiches et les pois cassés deviennent éligibles : une bonne nouvelle pour de nombreux exploitants en bio. L’aide se monte à 104 €/ha. Pour les mêmes raisons, l’aide aux légumes fourragers est aussi maintenue. Ses conditions d’accès sont légèrement étendues, elle se monte à 149 €/ha.
Une nouvelle aide forfaitaire pour soutenir les petites exploitations maraîchères apparaît. Elle est accessible uniquement aux fermes de 3 ha de SAU max et ayant au moins 0,5 ha en légumes frais. La liste des cultures éligibles est en cours de finalisation par le ministère de l’Agriculture. Montant indicatif de l’aide en 2023 : 1 588 €/ha.
Pour l’élevage, une aide au veau bioveau sous la mère est disponible. D’un montant de 66 euros par animal, les critères d’attribution sont restrictifs et il convient de se faire conseiller.
2e pilier : l’aide à la conversion bio (CAB)
Elle vise à accompagner et à inciter les agriculteurs à s’engager en agriculture biologique, en compensant les surcoûts liés à l’adoption des pratiques et des méthodes de production spécifiques. Il s’agit d’un dispositif relevant du 2e pilier de la PAC, géré par l’État, à demander par le dossier PAC. En France, l’objectif est d’atteindre 18 % de SAU bio nationale en 2027. Les montants sont variables selon les productions. Ils s’échelonnent entre 44 €/ha pour des parcours ou estives et 900 €/ha pour le maraîchage. Avant toute demande d’aide, il est obligatoire de notifier son activité en agriculture biologique auprès de l’Agence Bio (https://notification.agencebio.org/homepage) et de s’engager auprès d’un des organismes certificateurs (OC) agréés. La demande se fait sur la plateforme telepac, comme pour les aides PAC. Un plafond peut s’appliquer, variable en fonction de la région (1 800 euros en région Aura par exemple).
— Marc GUILBAUD (Tribune Verte 3024)
Émilie Combebiac, agricultrice bio dans le Tarn : « Les aides à la conversion m’ont rassuré pour tester de nouvelles cultures »
Après avoir exercé 10 ans comme psychologue, Émilie Combebiac a repris, en 2017, l’exploitation familiale à Montvalen, dans le Tarn. Elle exploite aujourd’hui 142 ha dont une très grande majorité en grandes cultures. La conversion en 2018 de l’exploitation en agriculture biologique s’est accompagnée d’une diversification de l’assolement. « Très vite, j’ai cherché à implanter de nouvelles espèces avec l’idée sous-jacente de développer la vente directe et d’élargir mon offre, explique la jeune agricultrice, qui est l’un des nouveaux Talents Tech&Bio en 2023. J’ai testé plusieurs nouvelles espèces comme le haricot mungo, les lentilles corail, le pois chiche… Je ne sais pas si j’aurais osé autant d’essais si je n’avais pas bénéficié des aides à la conversion qui me permettaient de compenser d’éventuelles pertes financières en cas d’échec. » Désormais, Émilie Combebiac cultive pas moins de 28 espèces différentes. Si une partie est toujours commercialisée en coopérative, Émilie développe aujourd’hui ses propres réseaux : « Nous avons débuté depuis peu la vente à la ferme. Nous travaillons aussi sur notre boutique en ligne. Une partie de la production est distribuée dans des boutiques en vrac ou vendue à des restaurateurs et traiteurs. Mon but est d’être au plus proche du consommateur, avec le moins d’intermédiaires possible. »
— Aude BRESSOLIER (Tribune Verte 3024)
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