Comment parvenir à réduire son turnover ?
Bien que les tensions soient moins vives sur le marché de l’emploi, certaines entreprises connaissent encore un taux de rotation important de leur personnel. Salaire, qualité de vie au travail, management… Il existe un certain nombre de leviers à actionner pour le réduire.
Contrats précaires, salaires modérés, conditions de travail difficiles, perspectives de carrière réduites… Certains métiers de l’agriculture et de l’agroalimentaire conduisent les salariés à changer fréquemment d’employeur, dans l’espoir d’améliorer leurs situations financière et professionnelle. Cette mobilité forcée entraîne un désengagement des travailleurs, voire des envies de reconversion. Les entreprises se trouvent directement impactées par ce turnover, qui peut s’élever à plus de 30 % dans certains cas. Un taux de rotation élevé entraîne une perte de productivité, mais aussi un surcoût financier – fidéliser ses équipes revenant nettement moins cher que de multiplier les recrutements. Des changements incessants dans l’effectif nuisent, par ailleurs, à l’image et la réputation d’une société.
Le phénomène de la « Grande démission »
La période qui a suivi la crise sanitaire a été particulièrement propice aux départs. On a parlé du phénomène de « Grande démission ». De nombreux salariés ont eu des fourmis dans les jambes, en quête d’un nouvel environnement de travail et d’un meilleur équilibre vie professionnelle – vie personnelle. Selon la dernière enquête du cabinet de recrutement Robert Half (lire l’encadré), cette parenthèse semble refermée avec une plus grande frilosité des salariés à quitter leur entreprise.
Si ces attentes n’ont pas disparu, les salariés privilégient désormais la sécurité financière. Dans le contexte inflationniste actuel, le salaire demeure, de fait, le critère numéro un pour inciter à changer d’entreprise. À l’employeur de mettre en place une politique de rémunération compétitive. À défaut de hausses substantielles, l’épargne salariale, l’intéressement ou des primes ponctuelles permettent de gagner en attractivité.
Répondre aux aspirations profondes
Au-delà du salaire, d’autres leviers permettent de fidéliser ses collaborateurs. La qualité de vie au travail (QVT) et la flexibilité restent des facteurs de stabilité importants. Après les dérives de la généralisation du télétravail, l’organisation du travail en mode hybride, alternant jours télétravaillés et jours en présentiel, est plébiscitée par les employeurs comme par les employés. Elle leur offre une autonomie tout en maintenant le lien social et la cohésion du collectif.
Il s’agit aussi de répondre aux aspirations profondes des salariés. Alors que les transitions écologique et numérique impactent un grand nombre de métiers, ils souhaitent avoir accès à des formations et des perspectives de carrière pour maintenir leur employabilité. La quête de sens est aussi prégnante chez les jeunes générations particulièrement sensibles aux enjeux environnementaux et sociétaux. Celles-ci questionnent leur employeur sur les actions RSE qu’il a concrètement engagées.
Last but not least, la qualité du management est essentielle. Courroie de transmission au quotidien, le manager de proximité insuffle, ou non, une bonne ambiance de travail, propice à créer un vrai sentiment d’appartenance. Les nouvelles pratiques managériales privilégient la bienveillance, l’autonomisation des collaborateurs et la culture du feedback.
— Xavier BISEUL (Tribune Verte 3040)
Avis d’expert : « La qualité du management est un levier clé de la fidélisation »
Maxime Cariou, PDG de la start-up T.O.P. (Team Opportunity Prediction)
En quoi la qualité du recrutement est-elle un élément clé de fidélisation ?
Maxime Cariou : Du fait de la pénurie de talents, certaines entreprises se précipitent parfois sur des profils qui ne leur correspondent pas. Elles paient cher ensuite ces erreurs de casting. Il convient de rester sélectif.
Il s’agit parfois de passer par des modes de recrutement alternatifs, certains candidats n’ayant pas de CV correct, voire pas de CV du tout. Cela ne les empêche pas d’être performants dans leur métier. Des techniques de recrutement sans CV s’appuyant sur des mises en situations professionnelles permettent de détecter les compétences techniques, mais aussi les qualités comportementales nécessaires pour le poste à pourvoir. Ces « soft skills » sont très importantes. Des « champions », techniquement parlant, peuvent n’avoir aucun sens du collectif et déstabiliser l’équipe qu’ils intégreront.
Le parcours d’intégration doit ensuite s’assurer que la greffe prenne bien. Demander un rapport d’étonnement à la recrue deux semaines après son arrivée permet de voir s’il rencontre des points de friction ou s’il a des attentes particulières.
Quel rôle le manager de proximité joue-t-il ?
M. C. : La qualité du management est un levier clé de fidélisation. Pour un management de proximité, je préconise un manager pour 6 à 7 collaborateurs. Il s’agit de faire émerger un sentiment d’adhésion à une communauté sans que cela ne nuise à l’intégration à l’ensemble de l’entreprise. Un bon manager peut avoir une réelle capacité de rétention par son aptitude à coacher son équipe, à faire preuve de reconnaissance et à anticiper les problèmes avant qu’ils ne surviennent. Le management s’apprend et il est conseillé de proposer des formations thématiques pour aider un cadre à gérer des situations complexes. Chez T.O.P., les collaborateurs évaluent leur manager par un système de notation. L’évaluation est anonyme et, en deçà de trois étoiles sur cinq, ils peuvent laisser un commentaire. Cela permet notamment d’avoir une tendance quand un nouveau manager prend ses fonctions.
Comment l’IA permet-elle d’anticiper les signes avant-coureurs d’une démission ?
M. C. : Un certain nombre de facteurs permettent de déterminer si un collaborateur est sur le départ, comme le temps passé dans ses précédents emplois ou son niveau de salaire par rapport au marché. Le profil de son manager est aussi un élément clé. Généralement, un manager toxique entraîne un grand nombre de démissions à la suite. L’algorithme de T.O.P. comprend de 15 à 20 critères qu’il convient d’adapter au contexte de l’entreprise. À partir des signaux remontés, la solution préconise un certain nombre d’actions préventives et correctives, comme augmenter le salaire, accorder une prime ou proposer une formation. Un simple tête-à-tête régulier avec le manager ou un déjeuner d’équipe peuvent parfois suffire à arrondir les angles. Notre solution permet de réduire le turnover de 10 % en quelques mois. C’est un processus d’amélioration continue qui permet, dans la durée, de faire diminuer la courbe. Réaliser cette analyse prédictive suppose toutefois d’avoir un grand nombre de données RH pour alimenter l’IA
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