Bretagne : Les légumes ont recours à la tech, mais aussi la main-d’oeuvre étrangère
Face à la pénurie de main-d’oeuvre, l’automatisation se déploie dans la culture et la récolte des légumes, mais ne suffit pas à compenser. D’année en année, c’est la main-d’oeuvre étrangère, notamment bulgare, qui assure la récolte. Mais l’agriculture attire aussi de nouvelles générations engagées pour l’avenir.
En cette fin septembre, le sol est quelque peu détrempé et le vent est vif sur ce champ de Riec-sur-Belon, à cinq kilomètres de Pont-Aven et à 15 km de Quimperlé, dans le Finistère. Mais cela n’empêche pas l’agronome Éric Kerloc’h, chef de la station Quimperlé d’Unilet, l’interprofession française des légumes en conserve et surgelés, de faire la démonstration des nouvelles technologies qui y sont testées.
D’abord, des outils, tels que Netirrig qui permet, grâce à une caméra au champ, de définir la quantité exacte d’eau dont la plante a besoin pour croître. Même niveau de technologie pour une autre machine, qui sert, elle, au désherbage. Indispensable, « d’autant que certaines mauvaises herbes, dont la datura, qui vient se glisser notamment dans les champs d’épinards, sont toxiques », rappelle Cécile Le Doaré, directrice générale d’Unilet. Autre matériel en démonstration : l’ARA, un pulvérisateur à haute précision développé par l’entreprise suisse Ecorobotix, qui permet l’application ultra-ciblée d’herbicides, de fongicides, d’insecticides ou d’engrais, en respectant les réglementations environnementales.
Avantages pour l’environnement
Le prix de ces machines ultrasophistiquées est élevé, mais le jeu en vaut la chandelle. « Chez Eureden, nous avons déjà deux machines qui tournent, précise Christophe Basile, président de la Fédération française des industries d’aliments conservés légumes et directeur général Branche Long Life d’Eureden. Cela nous a déjà fait économiser 80 % de produits pulvérisés, avec un impact environnemental évident. » « Sur les épinards, nous avons économisé jusqu’à 95 % de produits, et avec ces 5 % seulement, nous atteignons la même efficacité qu’avec les méthodes traditionnelles », renchérit Jean-Claude Orhan, président du Cenaldi, l’association nationale des organisations de producteurs de légumes pour l’industrie, et administrateur de la coopérative Eureden.
Au champ, dur de recruter
Couper des céleris en branche, un genou à terre, les tailler ensuite à la bonne hauteur, puis les passer par-dessus l’épaule pour les mettre dans une benne, le tout pendant des heures : pas étonnant que les producteurs de légumes ne trouvent plus grand monde pour effectuer ces tâches. Pas étonnant non plus donc qu’ils misent sur l’automatisation : une machine qui coupe, au ras du sol, le pied de céleri puis l’effeuille, par exemple. Même chose pour d’autres légumes. Certains agriculteurs qui travaillent pour l’industrie légumière font, pour des travaux de binage ou de désherbage délicats et pas encore totalement mécanisés, en partie appel « à la famille et les voisins », comme le précise l’un d’eux. Mais les candidats sont de moins en moins nombreux…
Pour certaines récoltes, les producteurs font donc appel à la main-d’oeuvre étrangère. Des Bulgares, en particulier, contractés par des agences spécialisées et qui reviennent année après année. Accueillis et payés selon le Code du travail français, ils sont précieux. « Et cela évite aux petites exploitations de faire, pour chacun des salariés, des déclarations et des fiches de paie, puisque c’est l’agence qui s’en charge », précise Anne-Sophie Kouassi, cheffe du service technique d’Unilet.
Pourtant, si la main-d’oeuvre de base manque, l’agriculture, l’agronomie et la culture des légumes attirent. « Des jeunes, et en particulier des femmes, ingénieures agro », se réjouit Didier Le Guellec, directeur légumes d’industrie d’Eureden. Signe qu’entre le grand air et la volonté de travailler à nourrir la population, mais aussi à protéger l’environnement, la ressource en eau et la biodiversité, ces métiers ont un confort et un sens que la relève a bien compris. D’autant que les professionnels de la filière ont adopté, en 2022, une série de 10 engagements à atteindre d’ici 2027 et incarnés par leur démarche RSE, les Légumiers de demain.
— Lys ZOHIN (Tribune Verte 3026)
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